Sécurisation de la chasse : la mission sénatoriale propose un dialogue renforcé avec les usagers et les élus

2022-09-16 19:44:15 By : Ms. Kimen Chan

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Publié le  16 septembre 2022 par  Anne Lenormand / Localtis Environnement,  Sécurité

Après avoir rencontré plus de 170 personnes pendant près de 48 heures d'auditions et réalisé cinq déplacements sur le terrain, la mission sénatoriale sur la sécurisation de la chasse a publié son rapport ce 14 septembre. Cette mission de contrôle commune aux commissions des affaires économiques et des lois avait été constituée en novembre dernier, après qu'une pétition sur le site de la Haute Assemblée a recueilli plus de 120.000 signatures. Elle avait été lancée par le collectif "Un jour un chasseur", créé à la suite de la mort d'un jeune homme de 25 ans tué devant sa maison dans le Lot par un tir de chasse. Elle réclamait notamment l'instauration des "dimanche et mercredi sans chasse" ou encore de "distances de protection autour des zones d'habitation qui soient égales à la portée maximale des armes", un taux maximal pour l'alcoolémie pour les chasseurs (il n'y actuellement pas de limite, mais l'alcoolisation peut être une circonstance aggravante en cas de poursuites après un accident) ou encore un relèvement de l'âge pour avoir son permis de chasser, actuellement fixé à 16 ans.

Selon les chiffres mis en avant dans le rapport sénatorial, issus des données de l'Office français de la biodiversité (OFB) et du dernier rapport de l'Institut national de veille sanitaire (INVS) datant de 2020, les accidents liés à chasse sont "en forte baisse et marginaux dans l'accidentologie en France".  Depuis 20 ans, le nombre d'accidents de chasse a baissé de 46% et le nombre de morts de 74%. Dans le même temps, souligne la mission, le nombre des chasseurs ne diminuait que de 29% et le nombre de grands gibiers tués augmentait de 75%, 55% des accidents ayant d'ailleurs lieu à l'occasion d'une battue au grand gibier (sanglier, chevreuil ou cerf).  Pour la saison 2021/22, "l'OFB a recensé 90 accidents de chasse au total (blessures corporelles liées à l'utilisation d'une arme de chasse), dont huit mortels. Parmi ces derniers, deux ont concerné des victimes non-chasseurs".

Selon les données de l'INVS citées dans le rapport, la chasse représente 4% des accidents traumatiques liés au sport, dix fois moins que les sports de montagne. Sur la route, les collisions avec les animaux sauvages causent plus de victimes que la chasse elle-même. La part des accidents liés à l’alcool est également plus faible à la chasse (9%) que sur la route (13 à 28% selon les circonstances). "Néanmoins, chaque accident est un accident de trop et les accidents de chasse ont deux spécificités : l’utilisation d’armes à feu et le fait que 12% des victimes soient des non-chasseurs, soulignent les sénateurs. Cependant, plus des deux tiers des accidents résultent de fautes graves enfreignant les règles élémentaires de sécurité." S’y ajoute une centaine d’incidents par an, c’est-à-dire des tirs sur des véhicules ou des maisons, qui auraient pu avoir des conséquences dramatiques, et des tirs sur des animaux domestiques ou d’élevage.

Citant les ministères de l’Intérieur et de la Justice, le rapport souligne aussi que les accidents de chasse font l’objet de poursuites systématiques et sont réprimés comme des homicides ou blessures involontaires. "Le taux de réponse pénale est de 90 à 95%. Aucun élément ne vient accréditer un phénomène de refus de plainte, le dépôt de plainte étant d’ailleurs possible dans n’importe quelle brigade ou commissariat, directement auprès du procureur ou en ligne (pré-plainte)", indique-t-il.

Malgré une législation déjà renforcée – depuis 2019, notamment, la loi a imposé des règles de sécurité pour la chasse en battue (gilet fluorescent, panneaux d'information), rendu obligatoire une formation décennale sur la sécurité, renforcé les pouvoirs de l'OFB et créé un fichier national du permis de chasser –, la mission estime que les chasseurs doivent encore progresser en la matière. "C'est une question de crédibilité et de confiance vis-à-vis des non-chasseurs mais c’est aussi une attente des chasseurs eux-mêmes qui sont neuf fois sur dix les victimes des accidents, insiste-t-elle. Bien entendu, le risque zéro n’existe pas, mais cela ne doit pas empêcher d’adopter le zéro accident comme objectif. La sécurité doit faire partie de la culture des chasseurs."  Parmi ses 30 propositions, figurent d'abord des mesures pour renforcer la formation, sans remonter l'âge d'obtention du permis mais en "généralisant le tutorat", ou encore l'obligation de passer un brevet de premier secours et un examen médical annuel. Elle propose également d'"interdire l'alcool et l'usage de stupéfiants lors de la chasse" et d'"aligner le taux d'alcoolémie retenu, l'interdiction des stupéfiants ainsi que leurs sanctions respectives sur les règles en vigueur en matière de code de la route".

Selon la mission, "les accidents résultent de tirs mal maîtrisés et d'une prise en compte insuffisante de l'environnement". Plutôt que d'instaurer des distances de sécurité autour des habitations ou des routes qui conduiraient à ses yeux à "interdire la chasse dans une grande partie de la France et poseraient des problèmes de régulation en créant des zones refuge", elle préconise d'"agir en amont et de mener des audits de sécurité des territoires pour mieux déterminer quand, où et comment chasser." Ces audits seraient à mener au niveau départemental et local.

Concernant la sécurité pendant la chasse, elle propose une harmonisation, "au besoin par la loi", des règles de sécurité figurant dans les schémas départementaux de gestion cynégétiques (SDGC) élaborés par les fédérations de chasseurs car elle relève que "certaines règles fondamentales n'y figurent pas ou sous forme de recommandations, ce qui empêche l'OFB de sanctionner leur non-respect voire entraîne l'annulation d'une sanction." Elle demande également le développement des postes surélevés de tir "pour garantir un tir fichant" et propose que le vol ou le sabotage de tels dispositifs soient plus gravement punis.

Autre recommandation : la déclaration obligatoire des battues au grand gibier. "La loi exige qu'elles soient signalées par des panneaux mais les autres usagers de la nature en prennent connaissance trop tardivement voire risquent d'être déjà sur place avant les panneaux ne soient posés", observe la mission qui fait aussi valoir que les élus demandent également à savoir où l'on chasse sur leur commune. Des expérimentations déjà menées avec succès l'incitent donc à proposer une "déclaration préalable et systématique des battues, notamment via des applications mobiles". En contrepartie, les maires pourraient prendre plus souvent des arrêtés d'interdiction des zones de chasse lorsque la sécurité le justifie. D'autre part, "pour éviter que ces déclarations ne soient utilisées pour faire obstruction à la chasse", la mission soutient la création d'"un délit d'entrave au déroulement d'activités sportives ou de loisir légales", une revendication des chasseurs face aux militants qui tentent notamment d'empêcher des chasses à courre.

En matière de police de la chasse, elle veut accroître le rôle du préfet dans l’élaboration des SDGC et lui permettre de limiter les jours et heures de chasse pour garantir la sécurité des personnes. Elle propose aussi de conforter les effectifs et les moyens juridiques de l’OFB mais aussi de renforcer les compétences ou les moyens d’autres acteurs. La mission propose ainsi de donner compétence aux policiers municipaux en matière de chasse et de clarifier les prérogatives des agents de développement des fédérations et des gardes particuliers.

S'agissant des relations avec les autres usagers de la nature, la mission veut "prôner la cohabitation plutôt que le partage". "Instaurer un ou plusieurs jours sans chasse serait censé assurer la tranquillité des autres usagers (…). Mais cette idée de partage a une dimension d’exclusion de certains au profit d’autres à laquelle la plupart des fédérations de sport d’extérieur et de nombreux autres acteurs s’opposent, craignant un 'saucissonnage' de la nature et l’exacerbation des conflits dont ils sont déjà les témoins", estime-t-elle. "Les chasseurs soulignent pour leur part qu’ils ne monopolisent pas l’espace, les jours et lieux de chasse étant limités, qu’ils exercent souvent ce loisir sur leur propriété ou contre un loyer et qu’ils doivent réguler le gibier dont ils payent seuls les dégâts", ajoute-elle. Autant de raisons qui l'ont poussée à ne pas retenir "une règle nationale uniforme", tout en se disant "convaincue que localement des demandes doivent être entendues".  Elle prône donc "un cadre de dialogue pour qu’émergent les solutions adaptées", la chasse ne pouvant "se pratiquer dans les mêmes conditions aux abords des métropoles et dans les zones peu peuplées".

La mission recommande in fine de créer des outils de dialogue. Pour objectiver et traiter les incidents et conflits d’usage autour de la chasse, elle propose que l’OFB crée une plateforme de recueil des faits pour en avoir une vision globale et objective. Elle préconise également d'"amplifier" les chartes que la Fédération nationale des chasseurs (FNC) et des fédérations départementales (FDC) ont déjà signé pour mieux dialoguer avec d’autres usagers de la nature. Selon la mission, les FDC pourraient aussi être membres des syndicats mixtes des parcs naturels régionaux (PNR) et des commissions départementales des espaces, sites et itinéraire (CDESI). Quant au ministère des sports, il pourrait intégrer les chasseurs au réseau Suricate de signalement des incidents et pollutions dans la nature puisqu’ils sont gestionnaires de sites et jouent déjà le rôle de sentinelles de l’environnement dans d’autres domaines.

Aménagement et foncier, urbanisme,  Environnement,  Sécurité

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