Roland-Garros : «Le court central l’a toujours fait rêver», Diane Parry comme à la maison - Le Parisien

2022-05-27 18:30:24 By : Mr. Alex Huang

Ils ont tous ce même souvenir, cette même image de Diane Parry. Celle d’une petite fille de « 4 ou 5 ans » qui suivait son père et ses trois grands frères au club de tennis de Boulogne-Billancourt et qui « ne restait jamais en place ». Une boule d’énergie et de bonheur. Déjà ! « Elle était au bord du court et jouait avec des balles de tennis ou de foot, elle était déjà très douée. Des éducateurs du club de foot voulaient même la recruter mais elle a toujours préféré le tennis », se souvient Philippe Joliot, directeur général du TCBB.

Le TCBB, le club de toujours de Diane Parry. « Pendant le Covid, on lui a demandé d’intervenir pour des sessions sur les réseaux sociaux, elle a toujours dit oui », apprécie Joliot. C’est dans le stade Le Gallo, situé sur les bords de Seine, à quelques hectomètres du domicile familial et des allées de Roland-Garros, que la révélation bleue du Grand Chelem français (avec Léolia Jeanjean) a frappé ses premières balles jaunes et s’est mise à rêver d’une grande carrière.

Une carrière qui a pris une autre dimension depuis quelques jours. La Française de 19 ans vient d’écarter de sa route la Tchèque Barbora Krejcikova, n° 2 mondiale et tenante du titre, et la Colombienne Camila Osorio. Elle affronte ce vendredi l’Américaine Sloane Stephens pour décrocher son sésame pour les 8es de finale.

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« Ça fait plaisir de la voir là, il y a beaucoup d’émotion car on a fait un bout de chemin ensemble, confie Cécile Palicot, 50 ans dont 40 ans au club, et premier coach de la future pépite entre ses 4 et 11 ans. Elle était la plus jeune du groupe mais elle était déjà différente. Elle était la plus déterminée, la plus sportive. Elle était douée pour n’importe quel sport. » « On était obligé de la repérer, de la voir, elle sortait du lot, poursuit Gilles Galmisch, directeur sportif au club. A 5 ans tous les enfants n’ont pas ses qualités. »

Des aptitudes physiques et cette obsession, déjà, du beau geste. Ce n’est pas un hasard si son modèle reste Roger Federer. « Elle devait avoir un poster de lui dans sa chambre, sourit Cécile Palicot. C’est son idole, son inspiration, encore aujourd’hui. Elle voulait avoir son revers à une main. » Quand elle était petite, un entraîneur voulait qu’elle conserve un revers à deux mains. En vain. Parry a fini par obtenir ce qu’elle voulait et a commencé à jouer à une main vers 12 ou 13 ans. « Elle est déterminée, elle sait ce qu’elle veut», poursuit sa première coach. Parry restera toujours Parry.

Mais l’esthète doit apprendre à devenir plus pragmatique. « Diane aime jouer joli. Nous, en Espagne, on dit que si tu veux voir quelque chose de joli, tu vas au théâtre. Ici il faut gagner, claque Gonzalo Lopez Sanchis, son coach espagnol. Elle doit apprendre à faire la cuisine, savoir utiliser sa panoplie, prendre un risque. Parfois, elle se frustre mais elle a le jeu pour déstabiliser ses adversaires. »

À 12 ans, une scoliose l’oblige à porter un corset et la pousse loin des courts pendant six mois. Mais au lieu de s’avouer vaincue, la petite Diane en profite pour travailler sa posture. Et revenir plus forte que jamais. Elle passe les étapes à la vitesse de l’éclair et intègre, à 16 ans, le Centre national du tennis français.

Elle n’est pas dépaysée. Il se trouve juste en face du lycée Jean de la Fontaine où elle suivait sa scolarité après avoir fréquenté les bancs de l’école primaire Dupanloup… située elle de l’autre côté du boulevard d’Auteuil, en face du stade de Roland-Garros. Certains diront qu’il n’y a pas de hasard.

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Le tennis était une évidence dans la vie des Parry. Joël, le patriarche, continue de disputer des matchs loisir tous les samedis, ses trois grands frères ont tous pratiqué avant de filer vers les terrains de foot – l’un d’eux est parti aux États-Unis pour jouer en université – et sa petite sœur Alyssia joue aussi. Elle est une enfant de la petite balle jaune. « C’est son projet, elle écrit son histoire mais elle est soutenue par toute sa famille », explique Galmisch. À l’automne, Diane Parry a quitté le cocon familial pour emménager avec son copain… à 100 m de chez ses parents.

« Discrète », « humble », « posée », « la tête sur les épaules », « bien élevée dans une famille équilibrée », Diane Parry est aussi une jeune fille pressée. Dès sa naissance d’ailleurs puisqu’elle est arrivée au monde avec quelques jours d’avance sur la date prévue, ce qui explique pourquoi elle est née le 1er septembre à Nice, où ses parents étaient en vacances, et non en région parisienne. En 2019, elle est sacrée championne du monde junior et fait parler d’elle à Roland-Garros en devenant, à 16 ans, la plus jeune joueuse depuis une décennie à remporter un match dans le tableau des « grandes ». Ce vendredi, elle peut se hisser en 8es de finale de « son » tournoi.

« Je me souviens encore quand on jouait des matchs par équipes enfants au TCBB et, là, dix ans après, elle joue Roland-Garros, sourit Emma Trouillet, son amie d’enfance. Le court central Chatrier l’a toujours fait rêver. Elle habitait à côté et passait tous les jours devant. C’était un rêve. C’est magique. Mais elle le mérite. C’est une fille tellement simple, gentille. Avant son deuxième tour, elle était plus stressée de savoir son chien seul depuis des heures que par son match. » L’un de ses frères a dû aller sortir Cilau, le berger d’un an.

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Avec Diane, Parry est aussi une fête. « C’est une bonne vivante, elle ne dit jamais non à un bon resto et à des soirées entre amis ou avec sa famille, raconte Emma Trouillet. Après chaque victoire, ses frères font la fête et elle a hâte de la faire avec eux… mais pas tout de suite. »

Après avoir effectué des allers-retours dans le Sud, où elle travaille et habite, Emma Trouillet sera de nouveau présente ce jeudi dans le box aux côtés du clan Parry. Mais, cette fois, elle compte bien rester dans la capitale. « J’ai posé ma semaine, je suis sûre qu’elle va continuer à gagner des matchs, j’y crois. » « À ce niveau, chaque match représente un challenge quand on est 97e mondiale, poursuit Cécile Palicot. Mais avec son jeu atypique et le soutien incroyable du public, tout est possible. » Diane en est convaincue et glisse : « Je ne compte pas m’arrêter là. »

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