L'accord sur la déforestation est essentiel pour ralentir le changement climatique, mais le Canada doit faire plus

2021-11-16 10:20:47 By : Ms. Dora Guan

Professeur agrégé et Chaire de recherche du Canada sur les forêts et le changement global, Université Wilfrid Laurier

Professeur agrégé et Chaire de recherche du Canada en biogéosciences atmosphériques aux hautes latitudes, Université de Montréal

Les auteurs ne travaillent pas, ne consultent pas, ne détiennent aucune action ou ne reçoivent de financement d'aucune entreprise ou organisation qui bénéficierait de cet article, et n'ont divulgué aucune affiliation pertinente au-delà de leur nomination universitaire.

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Lors de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques à Glasgow (COP26), le Canada, avec plus de 100 autres pays, s'est engagé à mettre fin à la déforestation d'ici 2030 pour préserver les forêts. Ceux-ci jouent un rôle clé dans l'absorption du dioxyde de carbone et le ralentissement du réchauffement climatique.

Les forêts sont les poumons de la planète. Ils absorbent de grandes quantités de dioxyde de carbone et le piègent dans les arbres et le sol. C'est grâce à ces processus que notre planète est désormais habitable et que, plus récemment, les impacts de notre dépendance aux énergies fossiles ont été atténués.

En tant que scientifiques écosystémiques, nous voyons un grand potentiel dans cet engagement à mettre fin à la déforestation. Ce n'est pas une idée nouvelle, cependant. Lors d'un sommet des Nations Unies sur le climat en 2014, plusieurs de ces mêmes pays ont convenu de mettre fin à la déforestation d'ici 2030. C'était un objectif ambitieux, qui est resté lettre morte jusqu'à présent. Au contraire, la perte de forêt a augmenté de plus de 40 % depuis l'accord.

Les engagements actuels de la COP26 sont cependant moins ambitieux : les pays visent uniquement à mettre fin à la « déforestation nette », ce qui signifie que l'exploitation forestière et la déforestation peuvent continuer à condition que la reforestation (replantation d'arbres) suive le rythme. Cette approche est basée sur l'hypothèse fallacieuse que les nouvelles forêts jouent le même rôle que les anciennes. Cela dit, une avancée majeure découlant de l'engagement de la COP26 est de se concentrer sur l'amélioration du développement durable dans les secteurs qui ont traditionnellement conduit à la déforestation.

Néanmoins, le Canada a encore du pain sur la planche s'il veut faire des progrès significatifs sur ce nouvel engagement et éviter de se retrouver dans une situation où ses forêts continuent de disparaître. Le Canada doit trouver un moyen de protéger ses forêts naturelles - celles qui n'ont pas encore été touchées par l'exploitation forestière, l'exploitation minière ou d'autres activités humaines. Ces forêts vierges sont les mieux placées pour offrir des avantages écosystémiques clés, notamment le stockage du carbone.

Les forêts absorbent le dioxyde de carbone (photosynthèse) et le libèrent (respiration). Cette absorption et ce relargage s'équilibrent et déterminent la taille du « puits de carbone » des forêts, c'est-à-dire la quantité de carbone qui y est stockée. Parallèlement à l'absorption du dioxyde de carbone, les forêts perdent de l'eau par leurs feuilles (transpiration). La déforestation influence ces processus et peut produire de fortes rétroactions sur le système climatique.

La déforestation affecte le cycle mondial du carbone - le transfert de carbone entre l'atmosphère et la surface de la planète et vice versa - car elle élimine de grandes quantités de carbone stocké dans les arbres et augmente les pertes de carbone. emprisonné dans le sol. Si les zones déboisées ne se régénèrent pas, la capacité d'absorption du dioxyde de carbone sera également réduite à l'avenir.

La disparition de vastes étendues de forêt intacte peut avoir des conséquences importantes pour l'eau aux niveaux local et régional. La déforestation peut réduire la formation de nuages ​​et donc les précipitations), augmentant ainsi le risque ou la durée des périodes de sécheresse dans des endroits qui subissent déjà les effets du réchauffement climatique.

Le Canada est composé de certaines des forêts les plus riches en carbone de la planète. Les forêts boréales contiennent en moyenne plus de carbone que leurs homologues tropicales. Pourtant, la taille de l'exploitation forestière et des autres activités d'extraction dans les forêts boréales du Canada est considérable. Les données de télédétection recueillies montrent que les activités forestières ont touché 650 000 hectares (1,6 million d'acres) de forêt par an entre 1985 et 2010.

Cela implique que les décisions de gestion des terres et le reboisement des paysages perturbés dans la région boréale du Canada peuvent jouer un rôle important dans les efforts d'adaptation et d'atténuation climatiques du pays. Mais trois défis majeurs doivent être considérés dans la planification, la mise en œuvre et la comptabilité pour permettre au Canada d'atteindre ou, idéalement, de dépasser les ambitions de son engagement à mettre fin à la déforestation nette pris à la COP26.

Au Canada, le réchauffement climatique attribuable aux activités humaines modifie profondément la fréquence et l'ampleur des phénomènes de perturbations naturelles, notamment les incendies et les insectes. Plus précisément, les pertes de forêt boréale dues aux incendies de forêt, au dégel du pergélisol, à la sécheresse et aux infestations d'insectes nuisibles sont à la hausse. Ces pertes de forêts se produisent en plus de l'exploitation forestière et du défrichement, et continueront de s'intensifier à mesure que le réchauffement climatique progresse.

Selon un récent rapport de Nature Canada, une association qui milite pour la protection des habitats et des espèces, ces perturbations naturelles sont largement ignorées dans les calculs de carbone forestier du Canada, ce qui peut conduire à une sous-estimation des émissions de carbone forestier provenant de la forêt. Canada par un ordre de grandeur.

Bon nombre de ces terres forestières perturbées peuvent se rétablir naturellement, mais il n'y a aucune garantie. Il est de plus en plus clair que la forêt boréale deviendra moins résiliente face au réchauffement climatique et aux perturbations qui en découlent.

Nous ne pourrons peut-être pas compter sur le rétablissement complet des forêts et de leur rôle comme nous l'avons fait par le passé. Nous devons tenir compte de ces changements d'origine humaine et liés au climat, en plus de l'exploitation forestière et de la déforestation, de manière honnête et transparente.

Dans les forêts boréales, 80 à 90 % du carbone est stocké sous terre, contrairement à la plupart des autres écosystèmes forestiers, où le carbone est stocké dans les arbres. La récupération du carbone dans les forêts boréales ne se fait pas rapidement et n'implique pas non plus la replantation d'arbres là où la déforestation et/ou la dégradation des terres se sont produites.

Elle nécessite plutôt le rétablissement assez lent des processus qui favorisent l'accumulation de tourbe et les grands réservoirs souterrains de carbone qui sont typiques des paysages boréaux. Ces moyens de restauration sont en plein développement, et quelques succès ont été obtenus.

Il est extrêmement important et urgent de protéger de manière ciblée les régions qui ont des dépôts de tourbe profonds. Parmi les endroits les plus riches en carbone au Canada se trouvent le bassin du fleuve Mackenzie et les basses terres de la baie d'Hudson, des régions également riches en ressources naturelles.

L'exploitation minière, la foresterie, l'hydroélectricité, le pétrole et le gaz sont au cœur de l'économie canadienne. L'engagement du gouvernement Trudeau à la COP26 ne mettra pas fin à ces activités et ne protégera pas les forêts anciennes du Canada.

Cet engagement canadien exige seulement que la couverture forestière nette soit maintenue constante, et le reboisement des forêts exploitées est déjà une pratique répandue dans une grande partie du Canada. Cependant, il existe de nombreuses preuves de l'impact de ces activités d'extraction sur les avantages et les services fournis par les forêts du Canada. Par exemple, les routes et les lignes sismiques associées à l'exploitation forestière, au pétrole et au gaz intensifient la perte de carbone et fragmentent le paysage, entraînant le déclin d'espèces telles que le caribou boréal.

Il est impératif que le Canada poursuive le reboisement et accorde la priorité à la protection de ses forêts primaires intactes si cet engagement doit avoir un impact significatif. Il est à espérer que le gouvernement Trudeau profitera de cet engagement pour passer rapidement du secteur extractif à des activités économiques plus durables, et qu'il arrime ces mesures aux objectifs de conservation et de réconciliation.

Cet article a été initialement publié en anglais

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