1914-1918, la mort chevauche en Flandre (1/5) - Le Miroir du Nord

2022-10-14 20:45:08 By : Mr. Frank Duan

Découvrez le premier de notre série de cinq articles sur les personnages célèbres morts au combat ou dans l’exercice de leurs fonctions en Flandre-Artois-Hainaut pendant la Première Guerre mondiale. Série à paraître chaque vendredi jusqu’au 11 novembre.

Ils avaient 20 ans, 30 ans, la quarantaine, parfois plus… Certains avaient embrassé la carrière militaire. Les autres, demeurés dans la vie civile, étaient pour la plupart paysans, ouvriers ou exerçaient des métiers dont beaucoup ont aujourd’hui disparu. 

Des centaines de millions de vies basculent lorsque, le 28 juin 1914, à Sarajevo, Gavrilo Princip, un jeune nationaliste serbe d’à peine 20 ans, abat le prince François-Ferdinand d’Autriche et son épouse, la duchesse de Hohenberg. Par le jeu des alliances, le double assassinat du couple héritier du trône de l’Empire austro-hongrois jette l’Europe, et bien au-delà, dans la guerre. 

On croit qu’elle sera courte. Mais la fleur au fusil orne bientôt les croix de bois. Ils avaient la vie devant eux mais les Orages d’acier, chantés par l’écrivain allemand Ernst Jünger en décidèrent autrement. Flandern in Not, in Flandern reitet der Tod. Flandre en détresse, en Flandre chevauche la mort, tel est le refrain d’un chant militaire allemand composé en 1916.

Osons l’écrire… Cette série d’articles est injuste. Car tous ceux morts au combat ou dans l’exercice de leurs fonctions en Flandre-Artois-Hainaut ne jouissent pas du même souvenir dans la mémoire collective. S’il est bien évidemment impossible de dresser une liste exhaustive de toutes les vies fauchées dans les Pays-Bas français pendant le premier conflit mondial, le vacher d’un petit village occitan, le mineur du bassin houiller de Saône-et-Loire, ne méritent pas moins leur place au Panthéon du souvenir que ceux, qui écrivains, qui sportifs internationaux ou militaires étaient déjà couverts de gloire.

A travers ces dizaines de vies modestement évoquées, c’est l’ensemble des acteurs, souvent involontaires, du grand suicide européen, qui sont honorés. Dans une Europe qui abdique et construit sa disparition, toutes ces vies gâchées devraient nous couvrir de honte. Tout ça pour ça…

Le 23 août 1914, à Condé-sur-l’Escaut, Fresnes-sur-Escaut, Crespin et Valenciennes jusque Roubaix et Tourcoing, des unités d’avant-garde de l’armée allemande s’opposent aux troupes françaises. Les terres du Nord sont plongées dans la guerre pour plus de quatre longues années. Trois jours plus tard, le 26 août, Jean Clairin meurt au combat à l’âge de 37 ans. Né à Nîmes, le polytechnicien et normalien devient un brillant mathématicien et occupe un poste en 1903 de maître de conférence à la Faculté des sciences de Lille, ville dans laquelle la guerre le rattrape. Adjudant au 26ème régiment d’infanterie territoriale, il est mortellement atteint par une balle au front dans un combat de rue à Thun-l’Evêque. Ses proches ne seront informés de son décès que deux ans plus tard.

La guerre s’enlise dans des tranchées dégoulinantes de boue qui contrastent avec les vertes pelouses qu’il avait l’habitude de fouler. Ce n’était pas son prénom de naissance mais tout le monde l’appelait Joe. Joe Anduran. Né à Bayonne, le joueur de rugby à XV signe à tout juste 18 ans au Sporting Club Universitaire de France à Paris avec lequel il est vice-champion de France en 1911 et 1913. Le talonneur basque s’impose comme une valeur sûre du rugby français et connaît une sélection en équipe de France en 1910. Un peu par chance il est vrai. L’équipe incomplète, un joueur parisien doit rejoindre de toute urgence la sélection nationale qui doit affronter le Pays de Galles. Le 2 octobre, Joe Anduran est tué à l’ennemi dans les combats de Bois-Bernard. L’homme servait dans le même régiment que Clairin. Il avait 32 ans et laisse une veuve et deux enfants.

Le lendemain, à Rouvroy, village voisin du précédent, le 269ème régiment d’infanterie tient ses positions et tente d’interdire l’entrée du village. René Gateaux est le chef de la deuxième section de mitrailleuses. Au petit matin de ce 3 octobre, le lieutenant natif de Vitry-le-François et plusieurs de ses frères de section meurent au pied de leur mitrailleuse au cours d’une violente escarmouche. Les cadavres sont enterrés à la hâte sans que l’on ait relevé leur identité. Le porté disparu Gateaux sera officiellement identifié et reconnu mort pour la France après la fin de la guerre. Comme Clairin, René Gateaux était mathématicien, passé par l’Ecole normale supérieure. Ses recherches sur la dérivée directionnelle exploitée dans les méthodes de calcul des variations le firent accéder à la notoriété scientifique et lui permirent d’obtenir une bourse pour travailler à Rome en octobre 1913. Rentré l’été suivant en France, la mobilisation le surprend. Mort à 25 ans, il ne reverra pas la Ville éternelle.

Louis-François Marcot se trouve à plus de 30 km au sud, à Bucquoy. Né à Vauvillers, petit village de Haute-Saône, en 1845, l’homme sera militaire. Sorti de l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr en 1866, il combat en 1870 avec le grade de lieutenant et échappe de peu à la mort lorsqu’explose une poudrière. Général de brigade en 1901, il prend la même année le commandement de Saint-Cyr. Marcot est promu général de division en 1907 et atteint la limite d’âge trois années plus tard. Il est alors âgé de 65 ans. La mobilisation générale provoque son rappel. Le général Marcot prend alors le commandement de la prestigieuse 81ème division territoriale. Une division composée de soldats expérimentés, engagée dès le début des combats en Artois et qui tient vaillamment ses positions au Sud d’Arras. Le 4 octobre, il est atteint par un éclat d’obus et meurt peu après de ses blessures. Il est le saint-cyrien le plus âgé mort pour la France et le seizième des 42 généraux français mort au combat depuis le début de la guerre.

A quelques kilomètres à l’Est de Bucquoy, se trouve le petit village de Foncquevillers. C’est en ces lieux que Marcel Casadesus tombe au champ d’honneur le 10 octobre à l’âge de 31 ans. On ne sait rien des circonstances de sa mort mais tout de son illustre famille de musiciens dont il est un membre de la première génération. Né à Paris en 1882, le violoncelliste est reçu au Conservatoire de Paris à seulement 14 ans et y obtient son premier prix en 1903. Avec son frère Henri, ils sont tous deux membres du célèbre quatuor à cordes, le Quatuor Capet, en même temps qu’il fut intégré à la Société des instruments anciens. Marié à la cantatrice mezzo-soprano, de renommée internationale, Marie Buisson, il eut un fils avant le début des hostilités. Claude Casadesus sera aussi un musicien célèbre et perpétuera la mémoire musicale de son père.

Le front se fige durablement. Occupés respectivement à hauteur de 70% et 25%, les départements du Nord et du Pas-de-Calais, constituent la ligne de front la plus septentrionale. Affluent des régiments provenant de tout le Commonwealth. Larrett Roebuck passe à la postérité lorsqu’il devient le premier joueur de football professionnel de l’Histoire. Né dans le Yorkshire en 1889, il connaît une enfance difficile et descend à la mine à l’âge de 13 ans afin de subvenir aux besoins de la famille, désormais que son père est décédé. Condamné à une peine de prison pour vol, il ment sur son âge et s’engage dans l’armée aussitôt qu’il recouvre sa liberté. Roebuck n’est alors âgé que de 15 ans et est envoyé en Inde où il se découvre un réel talent pour le football. Le jeune homme quitte donc l’armée et est recruté par le club de Huddersfield Town Football Club. Larrett Roebuck est déclaré mort le 18 octobre, à proximité de Beaucamps-Ligny dans des circonstances inconnues. Peut-être est-ce la raison pour laquelle beaucoup croient le jeune homme de 25 ans tué dans des combats dans l’Aisne. Malgré une courte carrière, le souvenir du talentueux défenseur demeure. A l’occasion du centenaire de sa naissance en 1989, les fans de Huddersfield accomplissement une minute d’applaudissement à la 18ème minute de la rencontre contre Blackpool.

Quelques jours plus tard, le 24 octobre, les combats font rage dans les faubourgs d’Arras. Sergent au 97ème régiment d’infanterie, Paul Proust meurt au combat à Saint-Nicolas-lez-Arras. Comme son père, le natif d’Ozouer-le-Marché, embrasse unecarrière politique, non dans son département de naissance, le Loir-et-Cher, ni à Paris où il exerce en sa qualité d’avocat mais en Savoie. En mai 1914, il est élu député dans la circonscription de Chambéry-Nord. Le député conservateur ne siégera quasiment pas au Palais Bourbon. Il est mobilisé quelques mois plus tard et décède à l’âge de 32 ans.

Premier comte Roberts, Frederick Roberts a déjà une longue carrière militaire derrière lui lorsqu’éclate la guerre de 14-18. Né en Inde en 1832, il étudie dans les plus prestigieuses institutions britanniques et intègre le collège d’Eton puis l’Académie royale militaire de Sandhurst. L’officier de Sa Majesté est bientôt mobilisé en Inde en 1857 où il participe à la répression des révoltes antibritanniques avant de poursuivre une longue carrière militaire qui le mène d’abord en Abyssinie, puis en Afghanistan, enfin en Afrique du Sud où il s’illustre de nouveau à l’occasion de la seconde Guerre des Boers. Le Field Marshal a la réputation d’être impitoyable. Aussi est-il le créateur des sinistres camps de concentration qui vont occasionner la mort de près de 27.000 soldats Afrikaners. Mis à la retraite, il n’occupe plus que des fonctions symboliques et davantage politiques que militaires. Le 14 novembre 1914, il meurt d’une pneumonie, à l’âge de 82 ans, tandis qu’il visite des régiments indiens stationnés en Artois. Sa dépouille reçoit l’insigne honneur d’être exposée dans le hall de Westminster et il reçoit des funérailles d’Etat.

L’année 1915 qui commence, est de très loin la plus meurtrière en nos Pays-Bas français. Chaque combattant est désormais intimement persuadé que la guerre courte, promise ou espérée, n’est qu’un leurre savamment entretenu par les va-t-en-guerre. Et nul ne sait combien de temps elle durera… La Grande faucheuse n’a que faire des jours fériés et elle frappe dès le 1er janvier. Le général Edmond Boichut témoigne dans ses Mémoires : « La palette à la main, l’illustre peintre Francis Tattegrain mourait à 63 ans, au champ d’honneur, alors qu’il reconstituait, sous les obus, l’esquisse du beffroi d’Arras. » Le peintre de l’école naturaliste avait une parfaite connaissance de l’Artois. Et pour cause ! Il naît à Péronne en Picardie en 1852 et séjourne pendant toutes les étés à Berck. Devenu adulte, le peintre vit entre Paris et la baie d’Authie où il établit son atelier de peintre. Francis Tattegrain peint les hommes et les paysages marins de toute la Côte d’Opale jusque Wissant. L’artiste peint également la Flandre et nous lui devons le tableau Les Casselois dans le marais de Saint-Omer se rendant à la merci du duc Philippe le Bon, le 04 janvier 1930. Ami de la peintre Virginie Demont-Breton, le péronnais accède à la notoriété dès 1879. Cette année-là, il est admis au Salon des artistes français dans lequel il exposera annuellement jusqu’à sa disparition. 

Lui aussi était peintre. Pierre Gourdault voit le jour en 1880 à Paris et compte parmi les élèves du célèbre peintre et illustrateur Marcel Baschet. Rattaché à l’école post-impressionniste, il exerce selon la technique de l’huile sur toile. Son œuvre intitulée Un enterrement dans les Deux-Sèvres, qu’il peint en 1910 le fait accéder à la notoriété. A deux reprises, il concourt pour le prestigieux Prix de Rome et installe en 1912 son atelier dans la ville de Tunis. Pierre Gourdault est fasciné par le Maghreb. La guerre le ramène en France. Simple soldat de 2ème classe, servant dans le 4ème régiment de zouaves de marche, Pierre Gourdault est frappé à la tête par un obus à la fin du mois de décembre. Il refuse d’être évacué sur une civière par ses compagnons d’infortune et croit pouvoir gagner l’ambulance par ses propres moyens. Il en est en réalité incapable. L’obscurité qui l’entoure n’est aucunement une nuit noire. Voilà que le peintre est aveugle. Pierre Gourdault meurt de ses blessures à Givenchy-le-Noble le 5 janvier, alors âgé de 34 ans. Il fut promu caporal et décoré de la Croix de guerre à titre posthume.

On ne sait s’il trouva la mort le 11 ou le 12 janvier et les circonstances exactes demeurent inconnues. François Laurentie est mort au combat à Roclincourt, à quelques kilomètres au Nord d’Arras qui chaque jour tend à disparaître davantage de la carte. Il naît à Paris en 1874 et grandit dans une famille légitimiste, proche du comte de Chambord. Le normalien est bientôt agrégé. Ses relations familiales lui permettent de se rendre en Autriche où l’historien se voir confier le classement des archives des Bourbons en exil. François Laurentie consacre ses travaux et recherches sur le personnage de Louis XVII, prétendant au trône mort en captivité à l’âge de 10 ans et dont la disparition suscite le mystère. Si le nom de Laurentie est aujourd’hui tombé dans l’oubli, il jouissait d’une grande popularité au début du 20ème siècle et comptait parmi ses amis et correspondants Jules Barbey d’Aurevilly, Jérôme Tharaud, Auguste Rodin, Louis Madelin et bien d’autres. Fauché dans sa 41ème année, il compte parmi les 560 écrivains tombés au champ d’honneur.

Bernard Ruellan est fauché par la mitraille et décède à l’hôpital de Frévent le 17 février 1915. Il est alors âgé de 26 ans. Né en 1888 à Paramé, près de Saint-Malo, l’adjudant-chef combattait dans les rangs du 3ème régiment de zouaves de marche. Comme des centaines de milliers d’autres soldats, il mène une vie discrète, « normale » dirait-on. Son père est armateur et la famille Ruellan ne manque de rien. Bernard ne manifeste aucune disposition artistique et ne s’engage pas en politique. II est certes animé d’un esprit aventurier. Aussi le jeune homme s’établit-il comme éleveur à Philippeville, alors en Algérie française. Il serait un anonyme de la Première guerre, un nom gravé sur un monument aux morts parmi tant d’autres, si sa fratrie n’avait pas payé un lourd tribut à la guerre. Lorsqu’est décrétée la mobilisation générale, treize de ses 18 frères et sœurs sont encore en vie. Installés aux quatre coins du monde, les dix garçons endossent l’uniforme. Bernard et cinq de ses frères, Julius, Louis, André, Berchmans et Henri, trouveront la mort sur différents fronts. La fratrie Ruellan est celle qui comptera le plus de membres tombés au combat.

Lauréat du Prix de Rome 1908 pour son œuvre intitulée Sophocle, adolescent, chante la victoire de Salamine, Camille Crenier est un sculpteur de renommée internationale. Le jeune homme naît en 1880 dans une famille modeste du 20ème arrondissement parisien. Sa condition sociale ne l’empêche aucunement d’intégrer l’Ecole des Beaux-arts de Paris où il est l’élève notamment d’Alexandre Falguière. De retour de son séjour romain à la Villa Médicis, il installe son atelier à Boulogne-Billancourt. Mobilisé, il participe au conflit au sein 3ème bataillon de chasseur à pied. Le 6 mars 1915, Camille Crenier est mortellement touché dans les durs combats de la colline de Notre-Dame de Lorette qui surplombe le village d’Ablain-Saint-Nazaire. Son corps repose parmi ceux inhumés dans la nécropole nationale à proximité de laquelle il trouve la mort à 34 ans.

Baron de la pairie du Royaume-Uni, 3ème baron Brabourne, Wyndham Knatch Hugessen est volontaire pour les Grenadier Guards, au sein desquels il porte l’uniforme avec le grade de 2nd lieutenant du 1er bataillon du régiment d’infanterie. Le 11 mars 1915, il meurt au combat à Neuve-Chapelle. Le baron Brabourne est alors âgé de 29 ans. Né en 1885 dans le Kent, Wyndham descend d’une illustre famille britannique. Formé au collège d’Eton, le jeune homme se destine à une carrière d’ornithologue et part au Paraguay afin d’y étudier les oiseaux vivant sous ces lointaines latitudes. Avec l’un de ses confrères, il ambitionne de réaliser un recueil d’études de l’ensemble des espèces volatiles vivant en Amérique du Sud. Le premier volume de The Birds of South America est édité à Londres en 1912. Cette même année, l’ornithologue prend la direction du Pérou, toujours animé des mêmes intentions scientifiques. Rattrapé par la guerre, il quitte le pays inca et se précipite en Angleterre pour être incorporé sous les drapeaux. Le second volume de son encyclopédie sera publié à titre posthume en 1917. Wyndham Knatchbull Hugessen, le passionné d’oiseaux, vole déjà depuis deux années avec les Oies sauvages. Membre de la Chambre des Lords, il compte parmi les 43 parlementaires britanniques tombés au champ d’honneur pendant la guerre.

Will Gladstone est le petit-fils de William Ewart Gladstone, ancien Premier ministre libéral de Grande-Bretagne à quatre reprises. Lui aussi passé par Eton, il étudie ensuite l’Histoire à la prestigieuse université d’Oxford, au sein de laquelle il préside le club étudiant de l’Oxford Union Society. Le jeune Will embrasse très tôt la carrière politique et est élu député à la Chambre des communes, représentant le district des bourgs de Kilmarnock en Ecosse. De l’autre côté de la Mer d’Irlande, dans la verte Erin, la population s’agite et certains commencent à manifester de sérieuses velléités d’indépendance. Comme son grand-père, Will Gladstone se montre partisan d’un statut d’autonomie pour l’Irlande. De nature pacifique, le député ne manifeste guère de sympathie pour la guerre. Il avoue même manifester de la peur, ce qui ne l’empêche nullement de se porter volontaire pour le front. Will Gladstone veut servir comme simple soldat. Refus. Il sera nommé 2nd lieutenant au sein du 3ème bataillon des Royal Welch Fusiliers et son unité arrive sur le front d’Artois en mars avant de gagner les tranchées le 11 avril. Deux jours plus tard, Will Gladstone est abattu d’une balle dans le front dans les combats à proximité de Laventie. Sa mort à l’âge de 30 ans crée la polémique. La dépouille du soldat-député est rapatriée en Angleterre afin d’être inhumée. Le traitement de faveur est perçu comme inacceptable par le général Fabian Ware qui obtient l’arrêt de tous les rapatriements de corps en Angleterre. Quelles que soient leurs origines et classes sociales, tous les soldats morts au front reposeront désormais sous la terre de leurs funèbres théâtres d’opération.

Comme son compatriote Wyndham Knatchbull Hugessen, dont il partageait le même prénom, le londonien d’origine écossaise Wyndham Halswelle combat dans les environs de Neuve-Chapelle, lui au sein du Royal Highland Fusiliers. Le soldat est touché par une balle et se fait soigner. La blessure est suffisamment légère pour que Halswelle regagne la tranchée peu après. Chose incroyable, il aurait été touché par une seconde balle tirée par le même fantassin allemand, cette fois-ci mortellement. Halswelle avait 32 ans et une longue carrière sportive derrière lui. Revenu de son engagement dans la seconde Guerre des Boers, il mène désormais une existence entièrement consacrée à l’athlétisme. Dès 1905, il bat le record du 400 mètres et remporte de nombreuses compétitions nationales. Le coureur participe aux Jeux olympiques de 1908…, dans sa ville natale et est involontairement responsable de la mise en place de couloirs sur les pistes d’athlétisme. Le fougueux Halswelle est en effet accusé de ne pas avoir couru droit et avoir gêné plusieurs de ses adversaires. L’athlète écossais demeure le seul britannique à avoir remporté les trois métaux, or, argent et bronze, dans des compétitions olympiques individuelles.

Ainsi s’achève le premier de cette série de cinq articles qui reprendra avec l’évocation des hécatombes des dimanche 9 et lundi 10 mai 1915. Retrouvez le second épisode le vendredi 21 octobre.

Crédits photo : John Warwick Brooke (photo d’illustration article), journal.cnrs.fr (René Gateaux), casadesus.com (Marcel Casadesus), assemblee-nationale.fr (Paul Proust), John Singer Sargent (Frederick Roberts), TCY pour Wikimedia (Bernard Ruellan), teamgb.com (Wyndham Halswelle)

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