Dix circonstances qui mènent à une nouvelle pandémie - Le Point

2022-05-27 18:41:50 By : Ms. Coral Chen

É pidémies et pandémies ne sont, malheureusement, pas nouvelles. Un simple coup d'œil à l'histoire de l'humanité suffit à montrer que la lutte de notre espèce contre les maladies infectieuses a été constante. Sans parler du récent Covid, la peste noire, le choléra, la tuberculose, la grippe, la typhoïde ou la variole ne sont que quelques exemples de celles qui ont laissé des traces indélébiles…

Chaque maladie nécessite une action spécifique et la mise en œuvre de différents mécanismes de prévention, de réponse et de traitement. C'est pourquoi il est essentiel d'identifier les origines et les modes d'apparition des agents pathogènes.

À cet égard, environ 60 % des maladies infectieuses émergentes signalées dans le monde sont des zoonoses (qui sont transmises entre les animaux et les humains). On estime qu'environ un milliard de personnes dans le monde tombent malades et que des millions meurent chaque année à la suite d'événements zoonotiques. Et sur plus de 30 nouveaux agents pathogènes humains détectés au cours des dernières décennies, 75 % ont pour origine des animaux.

L'émergence récente de plusieurs zoonoses – grippe aviaire H5N1, grippe aviaire H7N9, VIH, Zika, virus du Nil occidental, syndrome respiratoire aigu sévère (Sars), syndrome respiratoire du Moyen-Orient (Mers), Ebola ou Covid-19 (Sars-CoV-2) entre autres – a fait peser de graves menaces sur la santé humaine et le développement économique mondial.

Elles sont généralement imprévisibles, car beaucoup ont pour origine des animaux et sont causées par de nouveaux virus qui ne sont détectés qu'après coup. Cependant, il existe au moins dix facteurs dont nous savons déjà avec certitude qu'ils sont liés à l'émergence d'une future épidémie ou pandémie. Les voici réunis et expliqués ci-dessous.

Les préjudices causés par la guerre sont évidemment nombreux et complexes : les morts, les blessures et les déplacements massifs de populations pour fuir les combats sont les plus évidents. Mais l'émergence d'épidémies infectieuses est également étroitement liée aux conflits.

En 2006, des épidémies de choléra ont été signalées dans 33 pays africains, dont 88 % dans des pays touchés par des conflits. Ces dernières années, plusieurs pays du Moyen-Orient et d'Afrique ont connu des épidémies infectieuses comme conséquence directe de la guerre, exacerbée par les pénuries de nourriture et d'eau, les déplacements et les dommages causés aux infrastructures et aux services de santé.

Le changement d'affectation des sols est une modification majeure de l'écosystème directement induite par les populations humaines. Les conséquences sont très larges.

Ces altérations peuvent en effet affecter la diversité, l'abondance et la distribution des animaux sauvages et les rendre plus sensibles aux infections par des agents pathogènes. En outre, en créant de nouvelles possibilités de contact, ils facilitent la circulation et la propagation des pathogènes entre les espèces, ce qui peut au final conduire à une infection humaine.

Par la déforestation et la fragmentation des forêts, nous favorisons l'extinction des espèces spécialistes de ces habitats et le développement, l'installation d'espèces plus généralistes. Certaines espèces sauvages qui sont les hôtes d'agents pathogènes, en particulier les chauves-souris et d'autres espèces de mammifères comme les rongeurs, sont relativement plus abondantes dans les paysages ainsi transformés, tels que les écosystèmes agricoles et les zones urbaines, que dans les sites adjacents non perturbés.

L'établissement de pâturages, de plantations ou d'exploitations d'élevage intensif à proximité des lisières forestières peut également accroître le flux d'agents pathogènes de la faune sauvage vers l'homme.

L'évolution de la taille et de la densité de la population par l'urbanisation affecte là encore la dynamique des maladies infectieuses. Par exemple, la grippe tend à présenter des épidémies qui persistent davantage dans les régions urbaines plus peuplées et plus denses.

Le changement climatique augmente le risque de transmission virale interespèces. De nombreuses espèces de virus sont encore inconnues, mais sont susceptibles d'avoir la capacité d'infecter notre espèce. Heureusement, la grande majorité d'entre elles circulent actuellement de manière silencieuse chez les mammifères sauvages.

Toutefois, la hausse des températures attendue avec le changement climatique entraînera des migrations massives d'animaux à la recherche de conditions environnementales plus douces, ce qui facilitera l'émergence de « points chauds de biodiversité » (zone biogéographique menacée comptant au minimum 1500 espèces végétales et animales endémiques). S'ils atteignent des zones à forte densité de population humaine, principalement en Asie et en Afrique, de nouvelles possibilités de propagation zoonotique à l'homme apparaîtront.

Selon des prévisions récentes fondées sur des scénarios de changement climatique, d'ici 2070, la transmission de virus entre espèces sera multipliée par 4 000 environ.

La mondialisation a facilité la propagation de nombreux agents infectieux aux quatre coins du monde.

La transmission des maladies infectieuses est le meilleur exemple de la porosité croissante des frontières. La mondialisation et la connectivité accrue accélèrent l'émergence potentielle d'une pandémie, et sa diffusion rapide, en raison du mouvement constant des micro-organismes par le biais du commerce et des transports internationaux.

La transmission des zoonoses peut se produire à n'importe quel point de la chaîne d'approvisionnement en viande de brousse, de la chasse en forêt au lieu de consommation. Les pathogènes qui ont été transmis à l'humain à partir de la viande de brousse sont nombreux et comprennent, entre autres, le VIH, le virus Ebola, le virus simien spumeux et le virus de la variole du singe…

Un écosystème présentant une grande richesse en espèces réduit le taux de rencontre entre les individus sensibles et infectieux, ce qui diminue la probabilité de transmission des agents pathogènes. À l'inverse, les marchés d'animaux vivants et autres enclos cachés du commerce illégal sont des lieux où les espèces les plus diverses sont entassées dans des cages surpeuplées.

Dans ces conditions, ils partagent non seulement le même espace malsain et contre nature, mais aussi les ectoparasites et les endoparasites vecteurs de maladies. Les animaux saignent, bavent, défèquent et urinent les uns sur les autres : ce qui entraîne l'échange de micro-organismes pathogènes et de parasites, forçant ainsi des interactions entre espèces qui n'auraient jamais dû se produire.

Les micro-organismes évoluent constamment, naturellement et en réponse aux pressions de sélection directes et indirectes de leur environnement. Un exemple bien établi est celui des virus de la grippe A, dont le réservoir ancestral est le gibier d'eau, à partir duquel ils ont réussi à infecter d'autres types d'animaux.

Le développement mondial de nombreux types de résistance aux antimicrobiens chez les agents pathogènes humains courants est une démonstration claire de l'énorme capacité des micro-organismes à s'adapter rapidement.

Au cours des dernières décennies, dans de nombreux pays, on a assisté à un retrait progressif du soutien financier aux systèmes de santé publique.

Cela a décimé l'infrastructure essentielle nécessaire pour faire face aux épidémies soudaines. L'émergence récente et rapide de nouvelles menaces de maladies infectieuses, telles que le Covid-19, associée à la résurgence de maladies plus anciennes, comme la rougeole et la tuberculose, a des implications importantes pour les systèmes de santé publique mondiaux.

Nous devons être conscients que la préparation à d'éventuelles épidémies et pandémies futures nécessite une étude approfondie et consciencieuse des facteurs potentiels qui facilitent l'émergence des maladies infectieuses. Une analyse minutieuse et critique permettra de concevoir de futures stratégies de prévision et de prévention.

Raúl Rivas González est professeur de microbiologie à l'université de Salamanque.

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Article intéressant, un peu orienté

Tout à fait d’accord quant à l’aggravation par l’urbanisation et l’augmentation des populations. Certains points nécessitent d’être nuancés. Une forêt protégée n’est pas exempte de maladies. La forêt Brotonne, en Seine-Maritime est préservée, cela n’a pas empêché les chevreuils d’attraper une maladie qui avait posé la question de leur abattage il y’a quelques années. Les famines et les épidémies ne sont plus l’exclusivité de l’Afrique (pas toute l’Afrique d’ailleurs), ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine est un gigantesque drame juste chez un voisin. La confiscation des récoltes, le minage des champs, la destruction de l’habitat, des installations de l’eau potable, de la voirie d’évacuation des eaux usées sont les ingrédients de l’équivalent d’une bombe atomique. Quand à l’épidémie du Covid19, elle a certainement fait plus de dégâts dans les pays occidentaux en raison à la fois du vieillissement de la population et d’un environnement relativement aseptisé. Enfin, ce qui est dangereux pour un environnement, c’est l’introduction clandestine d’animaux exotiques dont on se débarrasse en forêt ou dans les rivières sans mesurer les conséquences.

Rappelons quand même que l'humanité a subie depuis des lustres des maladies pandemiques mutantes de (peste grâce aux rats, la lèpre ou le choléra, paludisme, dengue grâce aux moustiques, les amibes et microbes contenues dans nos déchets, nos maisons insalubres, etc. ). Sauf que ces pandémies voyageaient au mieux à dos de cheval ou de chameau. Donc rien de nouveau sous le soleil scientifique. Par contre, ce qui est hyper dangereux est totalement oublié par cette étude : la mondialisation, la surpopulation et surtout le tourisme de masse qui fait ramener toutes les mutations génétiques du monde à la vitesse grand V dans les valises de nos touristes fortunés. Ainsi une simple petite contagion dans la brousse africaine Ebola) ou asiatique se retrouve ainsi dans les toilettes des avions retours de nos touristes du jour au lendemain, se répandant telle une explosion dans nos contrées occidentales.

Surpeuplement humain en lui-même et migration humaine elle-même

Ne sont en aucun cas responsables de l'apparition d'épidémies ? Donc, uniquement responsable la migration animale (obligée) vers des régions surpeuplées ? L'Homme dans tout cela, n'est vu que comme simple transmetteur du virus ; on a l‘impression que le virus lui tombe en quelque sorte toujours sur la tête. Il n‘est jamais responsable en lui-même, mais uniquement par gestes interposés : voyages, échanges (mondialisation), déforestations, etc.

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